Coup de balai nippon dans les fermes à thons

Publié le par verts

Midi Libre: Édition du vendredi 21 novembre 2008
 
Le Japon demandera-t-il un moratoire de la pêche au thon rouge en Méditerranée lors de l'assemblée générale de la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (CICTA) qui se tient depuis lundi à Marrakech ? Même si, en ce moment, les stocks des mareyeurs nippons sont au plus haut et les prix du sushi au plus bas, c'est peu probable. Pour autant, le Japon est bien décidé à mettre de l'ordre dans le monde opaque de la pêche au thon rouge.

A Marrakech, une décision récente de Mitsubishi, leader dans l'industrie de ce poisson, fait beaucoup causer. Le Japonais vient de passer à la loupe les certificats d'exportation officiels qui assurent la traçabilité du poisson.

Il s'est rendu compte que les mêmes numéros avaient été utilisés à plusieurs reprises par ses fournisseurs : du poisson pêché illégalement qu'on aurait tenté de blanchir à son insu. 1 500 tonnes auraient été localisées dans des fermes tunisiennes, 1 100 à Malte, autant en Turquie... La quantité totale rejetée par Mitsubishi pourrait atteindre voire dépasser 8 000 tonnes !

Voilà qui, à Marrakech, renforce la position des écologistes. De Greenpeace au WWF en passant par Oceana, toutes réclament un arrêt immédiat de la pêche au thon rouge. Elles s'appuient non seulement sur ces cas de fraude caractérisée mais également sur le constat dressé par le Comité permanent pour la recherche et les statistiques (SCRS) de la Commission.

La parole des scientifiques du CICTA n'a pas varié depuis la réunion de Dubrovnik en novembre 2006 quand fut adopté un plan de reconstitution de la ressource sur 4 ans. Selon eux, la mortalité du fait des thoniers est trois fois supérieure au niveau qui permettrait au stock de se stabiliser. Ils estiment que la prédation des gros poissons, provoque un déclin rapide de la biomasse que ne parvient pas à endiguer l'encadrement de la pêche par les Taux admissibles de capture (TAC).

Ainsi, en 2007, les prises auraient atteint 61 000 t alors que le TAC, résultant du plan de Dubrovnik, était de 29 500 t ! Les scientifiques suggèrent donc soit une « fermeture spatio temporelle de la pêche » soit une réduction drastique des prises annuelles, « de l'ordre de 15 000 tonnes ou moins ». Les écologistes y voient donc un plaidoyer pour le moratoire.

Les thoniers, eux, redoutent que soit retenue l'option des 15 000 tonnes avec une période de pêche réduite. « Le moratoire serait la moins pire des solutions. On pourrait ainsi réclamer des aides pour rester à quai. Avec un TAC à 15 000 tonnes, c'est la mort assurée pour beaucoup », explique le Sétois Raphaël Scanapiecco.

Quelle position adopteront les 45 nations membres de la CICTA dont les intérêts divergent souvent ? A Marrakech, près des souks, l'heure est aux discussions... de tapis.

Jean-Pierre LACAN
Hier l'UE a déposé sa proposition. Elle est de réduire la période de pêche à deux mois (15 avril-15 juin) avec des taux de capture tels que prévus par le plan de Dubrovnik : 27 500 t en 2009. « Inadmissible » pour le Marseillais Mourad Kahoul.

Publié dans Pêche aux thons

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